Cette page regroupe des bizarreries diverses : impossibilités, jeux avec des règles, formulations correctes mais vraiment pas canoniques... Évidemment, l'on se refuse à employer des tours périphrastiques qui résoudraient le problème en alourdissant l'expression.
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Dernière modification : le 12 janvier 2010.
L'enfant que je veux que tu voies...
L'enfant auquel je veux que tu donnes...
L'enfant dont je sais que les parents...
Ces tournures sont correctes. Les dernières montrent que dans la première, c'est le premier que qui est le pronom relatif, tandis que le deuxième que est conjonction de subordination. Par conséquent, on devrait dire en suivant le même modèle :
L'enfant qui je sais que veut me voir...
alors que la formulation classique, mais peu usitée, est
L'enfant que je sais qui veut me voir...
et que celle qu'on entend le plus souvent est
L'enfant dont je sais qu'il veut me voir...
ce qui signifie Je sais de cet enfant qu'il veut me voir, qui a un sens tout à fait différent puisque cette phrase implique que je tiens l'information de la bouche de l'enfant même, ce que la formulation L'enfant que je sais qui veut me voir n'implique pas.
Grevisse donne la construction par dont pour fondée dans certains cas (en particulier avec des verbes comme dire pour lesquels la construction avec de est tout à fait usuelle), mais parfois contestable. Il faut dans tous les cas regarder la phrase où la relative a été développée (L'enfant dont je dis que... -> Je dis de cet enfant que...). En tout cas, la forme logique et inusitée L'enfant qui je sais que veut me voir pourrait s'appliquer même aux exemples les plus farfelus.
On trouve aussi L'enfant que je sais vouloir me voir..., mais dirait-on vraiment Je sais cet enfant vouloir me voir ?
Autres exemples (réellement rencontrés) :
Le nombre plus petit que lequel on veut que cette quantité soit...
La personne de mon entrevue avec laquelle je dois vous rendre compte, en considérant de mon entrevue avec comme une locution propositionnelle, sur le modèle de au travers duquel ou par l'intermédiaire duquel...
Aujourd'hui, je veux être professeur demain.
Demain, je voudrai être professeur.
Auparavant, je voulais être aujourd'hui étudiant et demain professeur.
Aujourd'hui que je suis vieux, je veux avoir été étudiant hier et professeur ensuite.
Les seules nuances de temps que nous pouvons rendre à l'infinitif sont le présent (être) et le parfait (avoir été). On aimerait avoir un futur, un vrai passé, et même (deuxième partie du dernier exemple) un futur du passé (un conditionnel).
Dans la dernière phrase, on dirait plutôt je voudrais avoir été que je veux avoir été, mais il faut en tout cas bien le distinguer de j'aurais voulu être qui indique que le souhait date de cette époque.
Tout le monde est peu intelligent. Tout le monde n'est pas intelligent. Personne n'est intelligent. Personne n'est peu bête. Et °Personne n'est pas bête ?
Il y va avec peu de choses. Il y va sans rien. Il y va quand même avec quelque chose, pas sans rien, mais sans superflu.
Je ne t'ai jamais aimé ; maintenant je t'aime à jamais.
Exemple de confusion : « Le médecin lui interdit de ne plus jamais me suivre dans mes courses » (Beauvoir).
L'Académie recommande de ne pas utiliser de ne explétif (je crains qu'il ne...) dans des phrases où se trouve un terme aucun, personne, rien, jamais... pris positivement, afin d'éviter toute confusion avec une négation véritable. Il put partir avant qu'aucun garde vînt ; il craignait qu'aucun garde ne vînt.
Sous valoir, je trouve dans mon Grand Larousse Universel "valoir quelque chose, lui être équivalent", ce qui devrait être une relation parfaitement symétrique. Certes, dans ce cas le problème provient en partie du changement de sens (négatif/positif) de rien. Mais ce n'est pas le seul problème :
Mieux vaut les reproches des grammairiens que l'incompréhension du peuple (Saint-Augustin). Ne surtout pas analyser reproches comme le sujet réel de valoir : les reproches des grammairiens valent mieux que l'incompréhension du peuple (qui devrait vouloir dire strictement la même chose) me fait comprendre que l'auteur s'intéresse aux commentaires que l'on peut faire sur sa grammaire et méprise le peuple, qui ne comprend pas son ouvrage.
Ils connaissent leur point de vue semble indiquer que chacun connaît son point de vue, mais Leur point de vue, ils le connaissent laisse imaginer un point de vue commun. Ils confrontent leur point de vue : je mettrais un pluriel, sauf s'ils confrontent leur point de vue à celui de leurs adversaires.
Ils ont échangé leurs points de vue : ils ont longuement discuté. Ils ont échangé leur point de vue : chacun a pris celui de l'autre.
Est-il venu hier soir ?
Est-ce qu'il est venu hier soir ?
Est-ce lui qui est venu hier soir ?
Est-ce hier soir qu'il est venu ?
Est-ce au soir qu'il est venu hier ?
Dans la langue parlée, l'accent pourrait permettre d'éviter les ambiguïtés de la formulation Est-il venu hier soir ?, mais on entend plus souvent Est-ce que c'est hier soir qu'il est venu ?, avec deux c'est... que.
Mais pourquoi pas :
Qu'est-ce dont Untel ne veut pas que les gens soient au courant ?
Si X s'était produit, nous eussions dû faire Y, bien que dans ce cas nous eussions... Le dernier eussions est-il un subjonctif ou un conditionnel ? Les deux seraient nécessaires, et concordent par miracle.
Au présent : Si X se produisait, nous devrions faire Y, bien que dans ce cas nous (aurions / ayons ?)... Manque un subjonctif conditionnel.
Au futur : Si X se produit, nous devrons faire Y, bien que dans ce cas nous (ayons / aurons ?)... Manque un subjonctif futur.
Pour faillir au présent (ou à l'imparfait), plutôt que les formes jolies mais inusitées en je faux, il faut, on conseille souvent d'employer manquer de, ce qui n'est pas satisfaisant :
Auparavant, chaque fois que je montais à cheval, je manquais de me blesser. Maintenant, je me suis entraîné, et je ne manque pas de me blesser chaque fois que je monte à cheval.
Je ne veux pas ne pas y aller, simplement je ne veux pas y aller.
Il ne faut pas y aller. Il faut même ne pas y aller. Pourquoi le fait d'intercaler même rend-il correcte la tournure choquante Il faut ne pas y aller ? Et Il ne faut même pas y aller ?
Je n'y vais pas pour perdre mon temps ! Je n'y vais pas, pour ne pas perdre mon temps. Vive la ponctuation.
Mérimée a écrit : « Je veux être foudroyé si elle n'irait pas remettre une lettre d'amour à la reine si je l'en priais. » (Chronique du règne de Charles IX).
Lorsqu'il eut eu été eu, nous lui expliquâmes comment il s'était fait avoir.
« Cela n'est pas attesté fréquemment dans l'écrit », selon Grevisse...
J'espère que non. Je ne l'espère pas. C'est inespéré.
Je t'aime bien. Tu es ma bien-aimée.
Une remarque peu pertinente. Une remarque impertinente.
Je voudrais quelque chose qui soit bon à manger, et beau aussi. Je voudrais quelque bonne chose à manger, et belle aussi.
Je connais une personne très matchiste. Elle bat sa femme.
Des querelles de (personnes stupides).
Des (querelles de personnes) stupides.
J'en ai aperçu que vous n'avez pas vues.
C'est un savant compromis dans la dissuasion nucléaire et les armements classiques. C'est un savant compromis entre la dissuasion nucléaire et les armements classiques.
Le patient fou attendait devant le cabinet médical.
La seconde mineure du sophiste chanteur était fausse.
Un cochon foutu. Un foutu cochon. Un lapin chaud. Un chaud lapin.
"Je viens de terminer cette corvée." "Moi, je n'en suis qu'au début, j'aimerais bien venir de terminer."